Chapitre 9-



Spike regarda d’un œil critique les étagères qui venaient d’être assemblées le long du mur du salon. Il y avait certainement quelque chose qui manquait. Elles avaient un air singulier.. oui, très singulier.

Il s’essuya le front et passa une main dans sa nuque. La chaleur était forte cet après-midi , et il était d’autant plus pénible de chercher à s’activer d’une quelconque manière. Qui plus est , il lui fallait se rendre à l’évidence , il était plus intellectuel que manuel.
Du moins dans certains domaines, songea t –il avec une nostalgie qui ne dura que l’espace d’un instant. Les fêtes charnelles avec Drusilla gardaient maintenant un goût très amer. Et les rares aventures qu’il avait eu au cours de son année à New York n’étaient pas inoubliables.

Il alla ouvrir le frigo en quête d’une bière fraîche ,mais il semblait qu’il n’ait pas été très prévoyant. Il se remplit un grand verre d’eau et retourna au salon. Non , décidément , ces étagères n’allaient pas.
Rupert avait promis qu’il passerait mais il était bientôt cinq heures et il n’avait pas de nouvelles.
Au moment où il se décidait à l’appeler , il sentit son portable vibrer dans sa poche de jean .

« Allô ? »

« Hem.. Spike ? C’est Giles. J’avais dit que je passerai mais nous avons des visiteurs imprévus.. je ..j’ai pensé.. »

« Oh ne t’inquiète pas, » l’interrompit Spike. « Mais je réalise que je n’ai pas très bien su lire la notice. Par contre j’aurais eu besoin de quelques outils supplémentaires. »

« Oui, oui bien sûr. J’allais te dire que je pensais t’envoyer Alex. Je suppose que tu ne te rappelles pas de lui.. Vous vous êtes connus la dernière fois que tu es venu ici. »

« Mais si je m’en souviens. Il est par là ? »

« Oui il est passé et je lui ai demandé si cela ne l’embêtait pas de venir te donner un coup de main. Il est très adroit. Il travaille sur un chantier .. Qu’en penses-tu ? »

« Pas de problème. Je l’attends. »

« Oh.. hem, eh bien , c’est parfait ! Je l’envoie, il devrait être chez toi d’ici dix minutes. Je suis vraiment désolé. »

« Ne t’inquiète pas , je comprends. A bientôt. »

« A bientôt. Oh.. et , n’oublie pas de passer à la bibliothèque Lundi , j’ai les ouvrages que tu m’as demandé. »

« Entendu. »


Spike se résolut à défaire les planches qui assemblaient le meuble quand on tapa à la porte.
Sur le seuil , se tenait un homme de taille moyenne ,le cheveux noir un peu en bataille. Vêtu d’un tee-shirt blanc sans manche qui mettaient ses épaules et ses bras musclés en valeur , il affichait une mine à la fois curieuse et tranquille. Spike n’eut aucune peine à reconnaître le tout jeune homme qui était l’un des plus proches amis de Buffy.

« William ? » dit-il en tendant la main.

« Oui. » Ils échangèrent une poignée solide. « Mais c’est plutôt Spike ces temps-ci. » Il s’effaça pour le laisser entrer.

« Oh oui, où avais-je la tête ! » s’exclama Alex avec une once de sourire.

Ils se dévisagèrent brièvement. Alex fut surpris de constater que ,malgré son apparence qui s’était radicalement modifiée , il reconnaissait un peu les traits du jeune Kensinton dans le tracé parfait du visage, et la façon de se tenir.
Alex avait apprécié William. Ils s’étaient fort peu vus , en deux ou trois occasions , si sa mémoire était bonne , mais le garçon lui était apparu comme quelqu’un d’attachant , et le fait qu’il soit orphelin un élément supplémentaire pour chercher à l’apprivoiser.
Il se demanda dans quelle mesure il y avait encore des aspects de William en lui.


« Mais vous n’avez pas tellement changé. » dit Alex d’un ton léger.

Spike haussa un sourcil . « Comment ? Je croyais m’être complètement débarrassé du pauvre infortuné qui était venu ici. »

Alex le regarda avec un sourire en coin , et nota la moue dérisoire .

« Oui ,physiquement. Mais vos yeux sont les mêmes. »

Spike eut une expression pensive et Alex se demanda ce qu’il lui avait pris de parler si franchement à quelqu’un qu’il ne connaissait pas vraiment.

« Pas trop de différence chez toi non plus, » répliqua Spike avec nonchalance , en allumant une cigarette dont il tira immédiatement une longue bouffée.


« Ah mais, les changements sont intérieurs ! » affirma Alex en s’avançant dans la pièce. Il portait une grosse boite d’outillage dans sa main gauche, et la posa au sol.
Il examinait d’un œil critique ce qui était censé avoir l’air d’éléments de bibliothèque et éclata de rire.

« Tu as mis combien de temps pour arriver à ce résultat ? »
Il n’était pas mécontent qu’ils soient passés au tutoiement. Alex aimait les choses simples , et les relations sans complication.

Spike fronça les sourcils et vint se tenir à ses côtés pour observer le travail.

« Deux heures. Je sais , je sais ! »

« Mais ce n’est pas grave, nous allons rectifier les erreurs, » dit Alex . « C’est un beau meuble » ajouta t –il en s’approchant et en passant une main à plat sur le bois.

Il jeta un œil sur l’homme blond qui l’observait avec un peu d’étonnement. A première vue , la carrure athlétique ,confiante , l’aspect plus anguleux de la mâchoire , le pli sensuel de la bouche , la blondeur éclatante de ses cheveux coiffés en arrière , et surtout l’expression d’ une dureté indéniable taillant ses traits harmonieux , faisaient oublier qu’il avait William en face de lui.
Mais au fond des yeux si bleus , il y avait bien une lueur de douceur qui n’appartenait qu’à ce jeune homme timide et sauvage qui avaient partagé quelques jours avec eux , cinq ans avant.


« Comment se passe l’installation , sur un plan général ? » Il entreprit de défaire les parties mal assemblées.

« Bien. J’ai un appartement confortable et les élèves n’ont pas l’air décidés à être insupportables, » répliqua t –il avec une petite grimace ironique. « Et toi ? Qu’es-tu devenu depuis la dernière fois ? »

Alex haussa les épaules avec fatalisme.
« Les études et moi.. nous n’avons jamais été les meilleurs amis du monde. Alors , voilà.. j’ai trouvé du travail dans une entreprise de construction et .. çà va plutôt pas mal ! »

Tout en discutant , les deux hommes réalisèrent des progrès spectaculaires dans l’assemblage des différents éléments. En fait , c’est plutôt Alex qui indiqua tout ce qu’il fallait faire , et en moins de temps que Spike ne l’eût cru possible , une superbe étagère ornait le pan droit du mur du salon.

« Voilà ! « s’exclama Alex en se frottant les mains. « Mais, as-tu réellement autant de livres ? » demanda t –il en contemplant la grandeur du meuble.

Spike l’enveloppa d’un regard un peu moqueur. « Non. »

« Ah ! Tu commençais sérieusement à.. »

« J’en ai beaucoup plus que ce qui peut rentrer là, » termina t –il avec une satisfaction amusée.

Alex le regarda comme s’il avait affirmé une incongruité. « Je refuse de participer à cette partie là du travail ! » prévint-il en pointant un doigt vers Spike.

Celui-ci secoua la tête en souriant. Contrairement à ce qu’il avait craint, la relation avec cet homme qu’il ne connaissait pour ainsi dire pas s’était engagée le plus facilement possible. Et il en avait tiré étonnamment un grand plaisir.

« Bien entendu. J’apprécie beaucoup ce que tu viens de faire. D’ailleurs je dois vider tous mes cartons de livres avant de les placer. J’aime l’ordre en littérature. Mais par contre , je peux te proposer à boire ? »

Alex prit une mine épanouie. « Avec cette température , c’est une bonne idée. »

« Je te demanderai juste un instant . Mon frigo est vide. Mais j’ai une épicerie juste en face. Je vais chercher de quoi nous désaltérer. Assoie -toi, » dit-il en indiquant le canapé.

Alex lui répondit par un petit hochement de tête.


La porte du magasin fit un petit bruit de grelot . Le visage de la plantureuse jeune fille rousse assise derrière le comptoir s’éclaira et elle adressa à Spike son sourire le plus enjôleur.

Il répondit par un coup d’œil appréciateur et un sourire.


Elle le regarda s’éloigner dans un rayon. Cet homme était si follement sexy qu’elle en oubliait de respirer. Elle avait bien entendu noté sa présence dans le quartier.
L’arrivée d’un célibataire aussi désespérément magnifique ne pouvait passer inaperçue.. Maintenant, s’il prenait l’habitude de venir faire ses courses ici régulièrement , la monotonie de son travail s’estomperait aussitôt.

Chloé arrangea sa jupe, et tira un peu sur les manches de son chemisier pour qu’il s’ajuste plus parfaitement sur son buste. Elle l’aperçut qui passait d’une rangée à l’autre. Elle soupira.

« Vous n’avez pas d’autre parfum ? » demanda t-il en montrant un pot de crème glacée à la vanille.
Elle sursauta légèrement , surprise de la façon presque silencieuse avec la quelle il était revenu.


« Si vous n’avez trouvé que celui-ci, non.. » minauda t –elle .

Elle se tenait ostensiblement le buste en avant. Cependant , à sa déception , cela ne semblait pas l’affecter.

« Dommage, » dit-il en secouant la tête.

« Mais, c’est délicieux ! » dit-elle alors qu’il repartait ranger le produit.

« Je n’en doute pas. » Il revenait. Elle laissa son regard s’aventurer sur la démarche féline , les muscles de ses bras , de sa poitrine. Il posait son panier rempli à ras - bord à côté de la caisse et elle murmura en baissant ses cils.

« Je suis désolée que vous n’ayez pas trouvé ce que vous vouliez en glace. »
Elle commença à saisir les produits pour les faire passer.

« Je reviendrais, » murmura t –il d’une voix teintée d’amusement.

« N’hésitez pas. »

Elle le regarda partir , les bras chargés de sacs. Elle ne demandait pas mieux que de l’avoir comme visiteur régulier.



Il trouva Alex en train de contempler les jardins que l’on apercevait par la porte - vitrée .

« Désolé d’avoir mis un peu de temps. J’ai pris deux trois choses à manger. Mais j’ai trouvé une bière excellente , même si çà ne vaut pas ce qu’on trouve en Angleterre. »


Il alla ranger les affaires rapidement. Alex le rejoignit et prit place dans un tabouret . Il offrit de décapsuler les bières. Elles étaient très froides et constituèrent un véritable réconfort.

« As-tu revu Willow ? » demanda t –il tout à coup , comme s’il venait seulement de songer à quelque chose d’important.

« Oui. Nous nous sommes croisés au lycée. »

« Evidemment ! Mais , tu as rencontré Buffy alors ? »

Le visage de Spike garda son impassibilité quand il parla. « Plusieurs fois. »

Alex enveloppa le jeune professeur d’une expression appuyée. Puis il reprit sa conversation insouciante. Mais Spike se demanda dans quelle mesure il n’avait pas compris que la jeune femme était une des raisons de son retour à Sunnydale.


* * * * * *


Buffy vérifiait le matériel de gymnastique qui avait été utilisé dans l’après-midi.
Elle avait eu une journée agréable , des élèves enthousiastes . Et cela lui avait permis de se changer les idées. Elle se redressa avec une petite grimace. Malgré une douche tiède et relaxante , elle se rendit compte qu’elle avait sans doute abusé de la souplesse de son corps durant la dernière séance.
Mais l’exaltation corporelle n’était-elle pas la meilleure méthode pour repousser les idées qui la tourmentaient depuis sa dernière rencontre avec Spike ?
Après un week-end calme où elle avait aidé Joyce à la galerie dans la perspective d’une prochaine exposition , et en raison de l’absence de sa collègue partie pour un petit voyage dans sa famille, elle avait passé le Dimanche soir chez Alex et Anya . Celle-ci commençait à évoquer un mariage au printemps , et l’avis de Buffy était requis et souhaité.
A son étonnement , Alex lui appris qu’il avait passé un moment en compagnie de Spike la veille , pour une installation impromptue de mobilier.
Il avait annoncé que le jeune enseignant était bien loin du tout jeune homme un peu gauche qu’ils avaient fréquenté brièvement , et qu’il s’était senti un peu intimidé. Mais il avait aussi affirmé que Spike avait l’air particulièrement heureux d’avoir déménagé et d’avoir quitté l’Est des Etats Unis pour la douceur californienne.

« Buffy, » avait-il dit d’un air très protecteur, « il a un côté prédateur qui m’inquiète. »

Son amie et sa fiancée l’avaient dévisagées , interloquées. D’ordinaire , Alex était si innocent dans ses observations des autres. Mais il pouvait aussi être remarquablement perspicace.

« Oui, et alors ? »

« Alors je me demande s’il ne va pas être follement intéressé par toi. Et toi par lui. »
Anya lui adressa un petit coup d’œil méfiant.

« Oui.. tu es célibataire.. une très belle célibataire, » ajouta t –il avec plus d’éclat dans le regard. Cette fois, Anya lui donna un petit coup de coude.

« Tu sais que je n’aime pas quand tu vantes les qualités de Buffy à vois haute, » bouda t –elle.

« On mon chéri, comment peux-tu t’inquiéter puisque je vais t’épouser bientôt ? » dit-il , câlin.

« C’est vrai ? Tu es bien décidé ? » s’exclama t –elle avec une telle joie que Buffy fut touchée de sa candeur.

« Mais je crois que c’est clair, » dit Alex en la prenant contre lui.

« Oh mon cœur.. » soupira Anya , le visage contre son épaule.

« Tu disais ? » demanda Buffy , soucieuse de revenir au sujet qui la captivait.
« Je disais qu’il y a des chances qu’il jette son dévolu sur toi. Il est seul , physiquement.. séduisant.. et tu es célibataire depuis longtemps. Et vous travaillez tous les deux au même endroit ! » termina t –il , un doigt en l’air , comme si ce seul fait était le plus important.

« Eh bien ? Pourquoi Buffy ne connaîtrait –elle pas les joies d’avoir un partenaire pour la fai.. »

« Anya ! » Les jeunes gens avaient élevé la voix en même temps.

« Sérieusement, » reprit Alex qui s’était levé et était venu prendre les mains de Buffy entre les siennes. « Je suis persuadé que c’est un homme à qui il doit être difficile de résister , mais.. si tu acceptes les risques , je ne voudrais pas te voir souffrir. »

Buffy sentit son cœur se serrer. Il était sans doute trop tard pour cela , songea t –elle avec mélancolie. Elle fit un sourire à cet homme qui croyait la mettre en garde d’un danger qu’elle ne connaissait déjà que trop bien.
Spike était d’une séduction ensorcelante.
Dangereuse.
Mais elle n’allait pas refuser l’extase et l’abandon sensuels qu’elle devinait qu’il pouvait lui offrir.
Même si elle se demandait si son cœur pourrait supporter ce voyage des sens.



Allongée sur le tapis de sol , elle s’étira longuement , les bras levés au dessus de la tête , relâchant ses muscles , les paupières fermées. Par les fenêtres ouvertes sur les jardins , une brise douce pénétrait dans la salle , transportant les parfums des rosiers poussant à profusion le long du mur , prés de l’entrée. Les oiseaux égrenaient leur chant insolent.
Il était presque six heures et même si le Jeudi était sa journée la plus longue , elle en appréciait le déroulement. Un silence imparfait baignait la pièce. Buffy se sentait flotter dans une léthargie délicieuse .
Elle n’ouvrit pas les yeux lorsqu’elle sentit un courant d’air prés d’elle. L’odeur distincte de cigarette, son parfum boisé, cela signifiait que Spike était maintenant auprès d’elle.

Elle éprouva une griserie immédiate. Elle voulait éviter d’aborder le passé , comme ils l’avaient fait chaque fois.
Drusilla et Angel seraient toujours les ombres nouvelles qui à présent se mouvaient dans leurs mémoires, et l’existence qu’ils avaient vécue chacun de leur côté ne pouvait s’effacer.
Mais à quoi servirait-il de jeter à la figure de l’autre le nom de celui ou celle qui avaient été leur premier amour ..

Elle respirait amplement, sentant ses yeux sur elle.

Il regardait son visage , son cou.
Elle l’entendit réprimer une petite plainte quand son regard descendit sur sa gorge qui se soulevait , ses seins voluptueux dont les formes se dessinaient sous le tee-shirt blanc .
Elle pouvait l’entendre sourire.
De ce sourire si prometteur , heureux et inquiet, chaud , rassurant et tendre. Celui de William.
William.. William.
La vie l’avait rendu plus dur , plus méfiant . Elle se dit qu’elle attendrait encore.. un peu.. à peine.. Son ventre frémissait. Une chaleur nouvelle s’accumulait dans ses membres , dans ses reins, un feu palpitant , vivant , auquel elle succombait.
« Buffy.. »

Elle refusait de rompre le charme. Les yeux obstinément fermés , son âme tremblante, son corps tendu alors qu’elle croyait avoir atteint les dernières marches de la relaxation la plus satisfaisante, elle se contenta de sourire légèrement.

« Buffy.. » répéta t –il. Et sa voix un peu râpeuse , profondément intime, la fit frissonner jusqu’au cœur .
Il posa une main sur son abdomen et elle se retrouva transportée dans ce passé fervent , jamais oublié.
Il ne bougeait pas.

Elle était dans la voiture et le bruit des vagues montaient à ses oreilles . La nuit fraîche faisait danser les derniers faisceaux de lumière venant du pacifique. Il la couvait de ses yeux ardents ..

Elle éprouva une telle douleur mêlée de regret qu’elle ouvrit ses paupières brutalement.
Les yeux clairs , d’un bleu aussi pur , la contemplaient. Une boucle de cheveux blond tombait sur son front , et il portait une expression gourmande , calme.

« Sais-tu que tu es une vision de bonheur ? » murmura t –il.

Il laissa ses yeux délibérément parcourir ce corps offert , et Buffy n’avait jamais vu une telle lueur de désir bouleverser les traits d’un homme.

« J’ai eu une journée fatiguante, » continua t-il d’une voix ronronnante. « Je me suis dis que , peut-être , tu serais encore là.. »

Buffy fronça son nez. « Je soupçonne que tu as mon emploi du temps en tête. »

« Oui, » reconnut-il en baissant la tête avec une petite grimace.

Ils se regardèrent encore. Elle nota qu’il portait un tee-shirt bleu pâle au lieu de son habituelle chemise. Et un jean . Il répondit à son étonnement muet.
« Je me suis changé. J’ai songé que je pourrais peut-être.. dépenser un peu d’énergie. Et je te découvre , allongée , seule, les yeux fermés.. »

Il mit sa langue derrière ses dents et elle reçut de plein fouet la sensualité qui se dégageait de tout son être . Il exerça une pression légère sur son ventre , ses doigts à plat , caressants.

« Energie.. de quelle nature ? » souffla t –elle .

Il eut un sourire suggestif . « De nature à me faire oublier le stress de toutes ces heures où j’ai dû répéter les mêmes choses.. » murmura t –il en se penchant un peu.

Elle distinguait des particules de couleur plus claires dans ses prunelles magnifiques. Sa peau .. elle avait envie de le toucher. Elle leva une main , doucement , vers ce visage qui hantait ses nuits.

Il frémit quand elle posa ses doigts , doucement , sur sa nuque.
Le reste de leurs corps n’étaient pas en contact, à l’exception de sa main sur son cou , de sa main sur son ventre, qui exerçait une délicieuse pression. Elle sentait simplement combien la puissance de ses muscles , à son côté , ne demandaient qu’ à rentrer en action.

« As-tu été curieuse , amour ? » murmura t –il .

« Non, » souffla t –elle.

« Pourquoi ? Pourquoi ne te décides –tu pas à ouvrir ce livre ? » Sa voix avait pris des intonations doucereuses , enveloppantes. « Tu dois le faire.. »

Elle avala douloureusement sa salive, demeura silencieuse. Il la regardait avec une attention qui la mettait dans un émoi contre lequel elle aurait voulu se cabrer.

« Je le ferai, » haleta t –elle , l’attirant vers elle. « Mais.. je songeais.. »

Leurs bouches étaient à quelques millimètres l’une de l’autre , et leurs souffles se mêlaient.

« Tu songeais ? » répéta t –il , en transe.

« Que j’aurais pu avoir quelques réponses.. »

« Oui, amour. »

« Sur ta bouche. » Elle avait à peine fini de prononcer ce mot que les lèvres de Spike s’écrasaient sur les siennes .
Affamées , dévorantes, dans un baiser si démesuré que Buffy accepta de s’abandonner sans autre sentiment que l’instant présent.

Spike buvait la douceur de ses lèvres , la soie de sa langue s’enroulant au tour de la sienne , et des flammes de joie éclataient derrière ses paupières.

Leur baiser continuait , patient et bouleversant.

Et Buffy goûtait sur les lèvres de Spike la ferveur maladroite de William , ses rêves et ses peurs, un ravissement , une douleur , la force d’un amour qui avait fait de lui cet homme audacieux, fier, dont les secrets se révélaient à peine.

Elle réprima le flot de larmes qui montaient inexorablement sous ses paupières , et s’offrit à sa bouche merveilleuse .

Il se redressa légèrement , leurs respirations haletantes. La contempla avec un émerveillement teinté d’inquiétude. « Peut-être n’est-ce pas le meilleur endroit pour écouter nos instincts, » chuchota t-il.

« Non, » reconnut-elle d’un ton paresseux. Elle allongea ses bras en arrière , surveilla la lueur de désir qui réchauffait le bleu de ses yeux devant le spectacle de ses seins qui se soulevaient. « Mais il est presque six heures.. je suppose qu’il n’y a plus grand monde dans les lieux. »

« Crois-tu que je pourrais venir, à l’occasion, me servir des agrès , pour m’entraîner un peu ? »

« Je ne sais pas, » dit-elle en mordillant sa lèvre inférieure. « Je suppose que venir faire quelques mouvements dans la salle ou emprunter des ballons n’est pas interdit, » Elle portait un air espiègle.
« A condition que je sois là. »

« Naturellement, » souffla t –il en se penchant à nouveau , et en respirant la douceur de la peau entre son oreille et son épaule. « J’aimerais que tu sois mon professeur.. personnel. »
Il avait ajouté ce mot avec une note si suggestive qu’elle en ressentit les effets fulgurants dans son ventre et son sexe où une chaleur moite se répandait.

« As-tu vraiment besoin de.. » Elle haletait et il parsemait son visage , son cou , l’échancrure de sa gorge , de petits baisers. « .. de conseils ? »

« Absolument, » jura t –il avec une voix fervente. « Quand cela te dérange t –il le moins ? »

Il avait repris une position assise, mais sa main gauche se tenait toujours posséssivement sur le bas du ventre de la jeune femme , et à cet endroit , sa peau lui semblait incandescente.
Elle songea combien elle aimerait ses doigts nus..

« Eh bien .. le Mardi , ou le jeudi , comme aujourd’hui, » répondit –elle.

Elle se redressa avec vivacité et il la regarda se pencher vers un banc pour prendre une veste de coton blanc qu’elle enfila.

« Nous commençons la semaine prochaine ? » demanda t –il encore.

« Pas de façon régulière ? Uniquement quand tu en auras assez d’être penché sur tes copies ? »

Il eut un sourire presque carnassier quand il assura : « Oui , amour. Mais , c’est un rendez-vous. »


Elle n’était pas dupe de son plaisir évident à parler avec des insinuations. Ils quittèrent les lieux côte à côte , et se dirigèrent tranquillement vers le parking. Ils croisèrent encore des professeurs , et les derniers élèves. Quand ils furent à la hauteur de la voiture de Buffy , il lui mit un doigt sur la bouche avant qu’elle ne puisse lui expliquer qu’elle avait mille choses à faire pour le lendemain.

« Je suis invité à dîner chez Giles et Jenny, » dit-il.

Il lui saisit doucement la nuque , de cette façon assurée qui l’agaçait toujours un peu.
« A bientôt , amour. »
Et il lui dévora les lèvres avec une faim aussi ardente que brève , la laissant interloquée et le cœur battant follement .


Elle demeura de longues secondes immobile , les nerfs à fleur de peau .
Quand elle sorit de sa torpeur , elle aperçut un groupe d'élèves assises dans l'herbe, qui avaient l'air de s'amuser infiniment.

Elle monta dans sa voiture en claquant la portière plus fort qu'il n'était utile.


A suivre.





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